La prise en charge doit être adaptée au type d’infertilité. Il n’est donc pas logique de commencer des traitements sans avoir au préalable fait une exploration sérieuse du couple (et non de la femme seule… un bébé ça se fait à 2…)
I - Les différents traitements possibles
Schématiquement sont possibles : les traitements médicaux qui stimulent l’ovulation, les inséminations intra-utérines, la chirurgie tubaire, la fécondation in vitro et la micro-injection encore appelée ISCI (intracytoplasmic sperm injection) ; bien entendu le traitement doit être adapté à la cause si une cause a pu être trouvée.
- La stimulation de l’ovulation
Il faut rappeler que l’ovaire travaille sous le contrôle de deux petites glandes situées dans le cerveau qui lui envoient deux signaux (hormones) : la FSH qui stimule la croissance du follicule et la LH qui provoque la rupture du follicule, c'est-à-dire l’ovulation.
Les médicaments utilisés pour corriger une ovulation défaillante, encore appelés inducteurs de l’ovulation, agissent soit au niveau du cerveau, plus précisément de l’hypothalamus et de l’hypophyse (c’est le citrate de clomifène), ou directement sur l’ovaire, ce sont les gonadotrophines (FSH et LH). Le citrate de clomifène, commercialisé sous le nom de Clomid ou de Pergotime est en général le premier traitement à utiliser sauf dans les anovulations profondes.
Les gonadotrophines, commercialisées sous le nom de Gonal F, Puregon, Menopur ou Fostimon, remplacent les hormones hypothalamo-hypophysaires défaillantes. Elles sont soit d’origine humaines purifiées (extraites des urines de femmes ménopausées) ou créées par génie génétique. Ces traitements, encore appelés inducteurs de l’ovulation, ont pour but de restaurer une ovulation normale. Ils doivent être surveillés par des dosages hormonaux et des échographies. Ils sont utilisés si la femme n’ovule pas pour obtenir un follicule. Ces mêmes médicaments inducteurs de l’ovulation peuvent aussi s’utiliser chez des femmes ovulant normalement mais dans le but d’obtenir 2 à 3 follicules en vue d’une insémination intra- utérine ou en vue de recruter une dizaine de follicules pour une fécondation in vitro ou ICSI. - La chirurgie tubaire
Lorsque les trompes sont obstruées, la rencontre ovocyte/spermatozoïde qui a normalement lieu dans la trompe ne peut plus se produire. L’hystérographie et la cœlioscopie permettent le diagnostic d’infertilité tubaire en montrant l’obturation de la trompe et le niveau de l’obstacle, soit au départ de l’utérus (on parle de la corne utérine) soit sur le trajet de la trompe soit à son extrémité. Il n’existe aucun moyen médicamenteux de "déboucher" les trompes ; seule la chirurgie ou plastie tubaire peut être efficace. Elle consiste soit à ouvrir l’extrémité de la trompe et à enlever les adhérences (espèce de voiles qui enveloppent les ovaires et l’extrémité de la trompe) soit à enlever la zone malade et à rapprocher les deux bouts sains. Cette chirurgie se pratique désormais essentiellement sous cœlioscopie, c'est-à-dire sans ouvrir le ventre, lors d’une très courte hospitalisation. - L'insémination intra-utérine
Le principe de l’insémination intra-utérine est le suivant : monsieur donne son sperme dans un laboratoire autorisé à préparer le sperme (liste sur le site de l’Agence de biomédecine) ; ce sperme préparé sera ensuite déposé dans la cavité utérine de madame par le gynécologue au moment de l’ovulation, le plus souvent dans un cycle préparé par des inducteurs de l’ovulation.
On peut en effet améliorer la rencontre ovocyte/spermatozoïdes en administrant des inducteurs de l’ovulation à la femme (pour recruter 2 à 3 follicules et non un seul comme en cycle spontané), puis en déclenchant son ovulation (lorsque les follicules sont jugés matures par les dosages hormonaux et l’échographie) par une injection d’hormones qui mime l’effet de la LH et provoque l’ovulation 37 à 40 heures après son administration. L’insémination intra-utérine est alors pratiquée juste avant l’horaire prévu de l’ovulation, ce qui permet aux spermatozoïdes d’être présents dans la trompe, prêts à rencontrer l’ovocyte lorsqu’il est émis par le follicule au moment de l’ovulation. L’insémination peut être réalisée au cabinet du gynécologue (la femme doit alors apporter le sperme préparé par le laboratoire, sperme maintenu à 37°C par un emballage isotherme) ou directement en centre d’Assistance Médicale à la Procréation. - La fécondation in vitro et la micro-injection (encore appelée ISCI)
Cette technique a été mise au point en Angleterre par Robert Edwards et Patrick Steptoe qui sont les responsables (et non les pères) du premier bébé éprouvette obtenu au monde : Louise Brown, née en 1978. En France, le premier bébé FIV a été obtenu par l’équipe de Clamart, avec René Frydman et Jacques Testart, en février 1982, suivie quelques mois plus tard par l’équipe de Sèvres avec Jean Cohen, Jacqueline Mandelbaum et Michèle Plachot.
La fécondation in vitro s’adresse, dans la législation française, à un couple formé d’un homme et d'une femme, vivants, mariés ou en mesure d’apporter la preuve d’une vie commune depuis au moins 2 ans.
Une tentative se déroule en 4 étapes : obtenir des ovocytes matures, préparer le sperme, mettre ces 2 gamètes (mot qui désigne aussi bien les ovocytes que les spermatozoides) en contact et enfin déposer le ou les embryons obtenus dans la cavité utérine.
La première étape est la plus compliquée. Il faut stimuler l’ovulation grâce aux médicaments inducteurs de l’ovulation pour obtenir une dizaine de follicules, surveiller la croissance de ces follicules par des dosages hormonaux et des échographies puis déclencher l’ovulation par une injection d’hormones.
Ce traitement impose une vingtaine de jours d’injections sous-cutanées, 3 ou 4 prises de sang pour dosage hormonal et échographies et le jour J a lieu la ponction ovocytaire pour aller recueillir les ovocytes. Cette ponction se fait sous anesthésie générale ou parfois locale au cours d’une hospitalisation dite de jour (c'est-à-dire en arrivant le matin et en sortant l’après-midi). Le conjoint doit donner son sperme le jour même dans le laboratoire du centre de FIV. Le travail du laboratoire commence alors : en cas de FIV, les ovocytes et les spermatozoïdes sont traités, puis mis en contact dans une éprouvette (d’où le nom), en cas de micro-injection un spermatozoide est introduit dans le cœur de l’ovocyte, on parle de fécondation assistée ou de micro-injection. Le ou les embryons obtenus sont ensuite déposés dans l’utérus de la femme, le plus souvent 2 ou 3 jours après la ponction. Les embryons restants, dits surnuméraires, sont congelés si leur qualité le permet, en vue d’une utilisation ultérieure. 14 jours après la ponction, un dosage hormonal permet de savoir si la grossesse tant attendue est au rendez-vous. En cas d’échec de la tentative, les éventuels embryons congelés peuvent être repris dès le cycle suivant ; en cas de succès, le couple doit renouveler chaque année sa demande de conservation jusqu’à ce qu’il soit prêt soit à les reprendre pour lui-même, soit à les donner à un autre couple infertile ou à la recherche, soit enfin à demander leur destruction. Contrairement à une crainte souvent exprimée, ces embryons n’appartiennent qu’au couple qui lui seul peut décider de leur devenir, le centre ou les médecins n’ont aucun droit sur ces embryons.
II - Quel traitement pour quel cas ?
- Les infertilités hormonales
Elles s’accompagnent souvent de troubles du cycle. Ces infertilités sont dues à une anomalie soit au niveau de l’ovaire lui-même soit au niveau des commandes du fonctionnement ovarien, au niveau hypothalamo-hypophysaire (l’hypothalamus et l’hypophyse étant les 2 petites glandes situées dans le cerveau qui commandent l’ovaire en lui envoyant 2 messages : la FSH, hormone qui favorise le développement du follicule et la LH, hormone qui déclenche la rupture du follicule c'est-à-dire l’ovulation).
Dans les anovulations (pas d’ovulation) ou les dysovulations (quelques ovulations par an ou ovulation de mauvaise qualité), le traitement consiste à induire une ovulation correcte par des médicaments qui peuvent agir au niveau de l’hypothalamus et de l’hypophyse (c’est le citrate de clomifène) ou directement sur l’ovaire, ce sont les gonadotrophines (FSH et LH). Le citrate de clomifène est en général le premier traitement à utiliser sauf dans les anovulations profondes. Si au bout de 6 cycles, la grossesse n’est pas obtenue, il faut revoir la thérapeutique et passer aux gonadotrophines qui vont remplacer les hormones hypothalamo-hypophysaires défaillantes. Ces traitements ont pour but de restaurer une ovulation normale, donc d’obtenir un follicule sur un des 2 ovaires et de le faire ovuler. Ils doivent être surveillés par des dosages hormonaux et des échographies pour vérifier qu’il y a bien un follicule voire deux mais pas plus, pour éviter le risque de grossesse multiple.
Beaucoup plus rares sont les infertilités d’origine ovarienne les plus sévères, où l’ovaire ne contient pas ou plus de follicules. Certaines femmes peuvent naître avec une anomalie chromosomique (syndrome de Turner où la femme n’a que 45 chromosomes car il lui manque un chromosome X) et n’avoir aucun follicule dans leurs ovaires. D’autres femmes peuvent développer une ménopause précoce (avant 40 ans) et ne plus avoir de follicules ; d’autres enfin peuvent avoir subi un traitement anticancéreux (radiothérapie ou chimiothérapie) nocif pour les follicules. Le seul recours lorsqu’il n’y a pas ou plus de follicules est alors le don d’ovocytes. Contrairement à des idées reçues, le don d’ovocytes est légal, parfaitement autorisé en France et totalement pris en charge par la Sécurité sociale, mais sa pratique se heurte à des difficultés du fait de la loi française. Le don doit être anonyme et gratuit, la donneuse doit déjà avoir eu des enfants. Du fait du faible nombre de donneuses, le délai d’attente avant un don d’ovocytes est long en France et de nombreux couples se tournent vers l’étranger où les donneuses sont indemnisées ou rétribuées et où l’obligation de conception antérieure n’existe pas et donc où les donneuses sont beaucoup plus nombreuses. L’Agence de biomédecine met en garde les couples sur son site contre les pratiques de certains de ces centres étrangers qui n’hésitent pas à transférer 3 ou 4 embryons à des femmes de 40 ans et comme ces embryons proviennent de jeunes ovocytes (âge moyen des donneuses 25 ans) les grossesses multiples sont nombreuses (non plus jumeaux mais triplés ou quadruplés !). - Les infertilités mécaniques
La cause la plus fréquente de cette obstruction est l’infection ; c’est pourquoi le meilleur traitement de l’infertilité est préventif par le traitement précoce des infections de la trompe (ou salpingites) et de toutes les maladies sexuellement transmissibles. L’hystérographie et la coœlioscopie permettent de décider si la chirurgie est recommandée ou s’il vaut mieux passer directement en fécondation in vitro. Si les trompes sont trop abîmées, il vaut mieux renoncer à la chirurgie et passer d’emblée en fécondation in vitro.
Les infertilités tubaires ont beaucoup diminué ces dernières années, les troubles de l’ovulation sont désormais la première cause d’infertilité féminine, l’épidémie de sida ayant eu un effet positif sur la protection contre les infections sexuellement transmissibles. - Les infertilités cervicales
Si le test post-coïtal est négatif et que le sperme est peu ou pas perturbé, on va proposer une stimulation de l’ovulation associée à une insémination intra-utérine pour court-circuiter le "verrou cervi" et déposer les spermatozoïdes directement dans la cavité utérine. - L’endométriose
Cette maladie se définit par la présence d’îlots de la muqueuse utérine qui à l’occasion des règles remontent dans les trompes et vont se greffer dans les trompes sur l’ovaire ou sur le péritoine (tissu qui recouvre l’intérieur de la cavité abdominale). Ces îlots peuvent altérer le fonctionnement des trompes, soit en les obstruant complètement – il faut alors recourir à la fécondation in vitro – soit en en perturbant l’ovulation – on peut alors proposer une stimulation de l’ovulation associée à des inséminations intra-utérines et seulement en cas d’échec le recours à la fécondation in vitro. - Les traitements de l’infertilité masculine
Ils sont aussi fonction de la cause.
Il faut distinguer les absences totales de spermatozoïdes (azoospermie), des insuffisances spermatiques (on parle d’oligospermie si le nombre de spermatozoïdes est insuffisant, d’asthénospermie si les spermatozoïdes sont peu mobiles, de tératospermie s’ils sont anormaux). Si l’arrêt des expositions toxiques (tabac +++ =) peut améliorer le sperme, il n’ y a pas à ce jour de médicament qui puisse améliorer réellement la qualité du sperme ; le seul traitement dont l’efficacité soit démontrée consiste à traiter le sperme émis par éjaculation et à l’utiliser soit pour des inséminations intra-utérines soit pour une fécondation in vitro, soit pour une ICSI (encore appelée micro-injection). Si le sperme est peu perturbé, on peut avoir recours aux inséminations intra-utérines, mais contrairement aux idées reçues, il n’est pas obligatoire de respecter la séquence insémination intra-utérine si échec fécondation in vitro si échec ICSI. Un test simple de préparation du sperme (test de migration survie) doit être pratiqué ; il permet, selon son résultat, de décider quelle est la meilleure technique en fonction du nombre de spermatozoïdes normaux que l’on peut obtenir après préparation (lavage, centrifugation, migration) du sperme éjaculé. Ce n’est donc pas le simple spermogramme qui permet de choisir la technique la plus adaptée à l’infertilité masculine. Schématiquement, si le test de migration survie permet de récupérer plus de 1 million de spermatozoïdes, on peut avoir recours aux inséminations intra-utérines, sous réserve que le pourcentage de formes anormales ne soit pas trop élevé. Le partage entre fécondation in vitro et micro-injection est un peu plus complexe, il tient compte du nombre de spermatozoïdes récupérés après migration et de leurs anomalies.
Dans quelques cas d’insuffisance spermatique, l’examen permet de déceler une varicocèle, c'est-à-dire une dilatation variqueuse des veines entourant le testicule et une intervention chirurgicale peut être proposée.
S’il n’y a pas du tout de spermatozoïdes dans le sperme, différentes explorations (examen clinique, dosages hormonaux, échographie testiculaire, caryotype) permettent de savoir si les spermatozoïdes ne sont pas fabriqués par les testicules (on parle d’infertilité d’origine sécrétoire) ou si les spermatozoïdes sont fabriqués mais qu’il ne peuvent être excrétés lors de l’éjaculation (on parle d’origine excrétoire).
Une biopsie des testicules peut être pratiquée pour permettre d’être certain du diagnostic et de congeler les spermatozoïdes si on en trouve. En l’absence totale de spermatozoïdes dans les testicules, la seule solution est le recours au don de sperme. Le don de sperme est particulièrement bien organisé en France par les CECOS (centre de conservation du sperme) ; le don est anonyme et gratuit. Les donneurs doivent avoir au moins un enfant, être âgés de moins de 45 ans ; ils sont soumis à des examens (sérologies du sida, des hépatites, de la syphilis) ; le sperme donné est congelé, puis conservé 6 mois et n’est utilisé que si le donneur a refait, 6 mois après son don, les différentes sérologies (afin d’être sûr que le donneur n’est réellement pas contaminé et donc contaminant).
Dans le cas où les voies excrétrices du sperme sont bouchées (azoospermies obstructives), il faut distinguer les obstructions congénitales (absence de développement des canaux tels les agénésies épidydimo-déférentielles) des obstructions acquises, en général après une infection génitale où une intervention chirurgicale est parfois possible pour réparer. Dans les deux cas, il est possible de prélever des spermatozoïdes au-dessus de l’obstacle lors d’une petite intervention sous anesthésie, de les congeler et de faire ensuite une (ou plusieurs) tentatives de micro-injection avec ces paillettes de sperme congelés. - Les infertilités sans cause
Ces infertilités vont en augmentant avec l’âge. Il faut alors parler d’infertilité sans autre cause que l’âge. Les traitements sont discutés par le corps médical. Certains médecins prônent l’usage du citrate de clomifène en première intention ; pour d’autres, ce traitement n’a qu’un effet placebo. Il ne peut, de toute façon, s’envisager que si la femme a moins de 40 ans ou mieux moins de 35 ans. Les seuls traitements dont l’efficacité soit démontrée sont l’association stimulation de l'ovulation et insémination intra-utérine et la fécondation in vitro. Si la femme a plus de 38 ans, il faut savoir passer plus rapidement directement en fécondation in vitro. - Les infertilités psychologiques : "c’est dans la tête Madame"
(Notez que l’on dit rarement "c’est dans la tête Monsieur !")
Certains médecins nient leur existence tandis que d’autres en sont trop friands, négligeant de regarder l’hystérographie d’une jeune femme qui vient de perdre son père tant ils sont convaincus que la perte du père est en cause ! Le sujet prête à discussion, mais avant de penser et encore plus de dire cela, il faut vraiment s’assurer qu’il n’y pas de cause organique à l’infertilité du couple. Bien sûr, il est plus facile d’avoir une ovulation correcte et de faire un enfant quand on n'est pas (trop) stressés mais les phrases du style "il ne faut pas y penser et ça viendra" de l’entourage, voire des médecins, sont particulièrement inadaptées ; comme si l’on pouvait vraiment s’empêcher de penser à ce que l’on désire très fort. Une chose est certaine : si des problèmes psychologiques peuvent empêcher les femmes d’ovuler, il n’a jamais été démontré que des soucis psychologiques puissent empêcher un bel embryon obtenu en fécondation in vitro de s’implanter. Non, tout n’est pas dans la tête des femmes. Mesdames vous n’êtes en rien "coupables", pas même responsables quand une tentative de fécondation in vitro n’a pas marché.